« Et mon coeur commença à battre… »

Vous allez vous dire: Allez ça commence bien… on a une sentimentale face à nous ! Peut-être, mais c’est réellement ce que j’ai ressenti en posant les pieds sur ces terres libanaises remplies d’une lourde et riche histoire.

 

Atterrissage à 4h du matin à Beyrouth avec, mais sans le savoir, Elodie, une autre volontaire, qui avait fait les 5h de vol ainsi que les 5h d’attente à Francfort. Je ne fis sa rencontre qu’une fois arrivée.

 

Surexcitée de nous retrouver dans un pays inconnu, nous n’avons pas le temps de faire connaissance qu’Arthur, le grand chef, et son fidèle escuyer Antoine, secrétaire général, nous emmènent hors de l’aéroport pour prendre un taxi.

 

La voiture file à tout allure à travers les rues illuminées. Les fenêtres ouvertes laissent passer le vent, qui gifle nos visages. Le chauffeur, un cigare à la main, une longue moustache et un regard luisant n’a que faire de respecter les feux rouges ou les limitations. Existent-elles d’ailleurs dans ce pays ?!

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« Liberté », voilà le premier mot qui me vient à l’esprit. 

 

Le chauffeur se met à discuter ! Peu importe la teneur de ses propos que je ne comprends pas ! Pour la première fois, je découvre la langue arabe, cette voix chantante et pleine de vie qui me rappelle mon sud.

 

Deux semaines sont passées ! Je commence à peine à connaitre les volontaires et les activités de Beyrouth et à prendre mes marques, que déjà Arthur m’annonce qu’il a besoin de moi dans le sud Liban, à Rmeich.

 

Un village à la frontière avec la Terre Sainte où les militaires de la FINUL (de l’ONU) essayent de maintenir un cadre de paix dans le conflit israélo-palestinien.

 

Des collines à perte de vue où au sommet l’on peut entendre le muezzin des villages voisins qui viennent rompre le silence. Une terre calcaire où les chemins caillouteux nous mènent à des champs d’oliviers et de tabac.  A la tombée de la nuit, 21h précises, les coyotes chantent sous la lune, un concert organisé rien que pour nous.

 

 

Quatre volontaires font parti de l’aventure et deviendront mes compères de route : Louise, Arthur, Baudouin et Bruno. Domitille nous rejoindra par la suite.

 

 

Là-bas, nos journées s’enchainent. Bien loin de ma petite vie de confort et de mes repères j’ai l’impression que le temps est en suspension, comme si ce que je vivais n’était pas réel.

 

 

Les matinées sont occupées à donner des cours de français dans les écoles de Rmeich et des villages alentours. Inventer, imaginer des jeux ludiques pour les enfants qui ont soif d’apprendre et qui se disputent littéralement la place pour passer au tableau. Français, anglais et arabe, voilà les langues qu’un enfant de 8 ans sait parler. Dans les cours de récréation il suffit de passer le pas de la grille pour que les enfants affluent autour de nous, en criant, en chantant…

 

Ce qui m’a beaucoup surprise, c’est qu’on laisse souvent les enfants chahuter, chanter, crier instaurant un brouhaha de fond permanent qui finalement montre que la vie est bien là. 

 

Les après-midi sont rythmées par la confection d’hosties avec l’association « pain de la miséricorde », par le ramassage de déchets dans les rues, les visites aux familles, les activités avec les scouts, nous retrouvant au milieu de plus de 100 jeunes, mais aussi, un à deux jours par semaine la reconstruction d’un couvent franciscain à Tyr, ville musulmane à 45 minutes au nord-ouest de Rmeich sur la côte. 

Mais que sont ces activités comparées aux rencontres que j’ai pu faire, à ces discussions avec les Libanais, ces moments tellement uniques et précieux.

 

A commencer par Jacques, un employé de SOS, qui fut pour moi un ami et un réel soutien dans mon quotidien. Il nous emmenait à chacune des activités dans son gros camion rouge, nous faisant frémir à chaque tournant pensant que le véhicule allait rendre l’âme.

 

Le Père Jawar, qui nous a invité aux 10 ans de leur association et où nous avons été mis à contribution en cuisinant des manouchés : pain, fromage, huile, thym, tous volés de main en main faisant un beau tableau coloré.

 

Soeur Béatrice (Béa pour les intimes) et son arche de Noé où dromadaire, paons, poules, singes, cheval, chats… vivent dans une harmonie incroyable. Nous expliquant que l’animal est le reflet de l’âme de l’homme.

 

Ou encore ces trois petites sœurs de l’Enfant Jésus à Tyr avec leur choix de vie hors du commun, nous expliquant le visage rayonnant, qu’elles vivent au milieu d’un camp de réfugiés palestiniens, lieu dangereux et strictement déconseillé par les autorités, et où leur but est de maintenir un lien entre les musulmans et les chrétiens.

 

Marie-Rose, une voisine de 70 ans qui nous proposait thé, café, gâteaux, fruits et fruits secs…

 

Les villageois de Rmeich, d’Ain Ebel, de Debel, de Baint Ich Bel.

 

Et il y en a tant d’autres… Je ne peux tous les citer sinon ce ne serait plus un témoignage mais un livre.

 

Vous n’avez pas idée de l’accueil chaleureux des familles.

 

Nagham et son témoignage de foi saisissant.

Les donations de colis de nourriture furent aussi des moments marquants. Réunis autour du poêle (seul moyen de chauffage de toute une maison), un café fumant entre nos mains et embaumant toute la pièce, la grand-mère allongée dans un coin et laissant entendre un petit ronflement rassurant, les enfants éparpillés ça-et-là dans la pièce, les familles se livrent.


Nous entrons littéralement dans leur intimité. Ils racontent, leur histoire, leur passé, leurs difficultés à joindre les deux bouts, l’avenir qui semble flou et complexe…


Malgré la difficulté économique du pays et le chômage qui fait rage, une sérénité se lie dans leurs yeux. Ayant connu la guerre jusqu’en 2006, ils ont fait leur cette grande leçon : la famille est essentielle ! Tant qu’ils sont tous réunis : grands-parents, parents et petits enfants, rien n’est insurmontable. Ils vivent jour après jour en rendant grâce, sans se soucier de l’avenir. Nous Européens qui courront après le temps, l’argent, les grandes carrières, la scène des projecteurs… c’est une véritable claque d’amour que je me prends en plein visage. 


Je pensais pouvoir du haut de mes 22 ans, changer radicalement les choses en marquant les esprits par mon passage, la réalité en est tout autre… Si je suis entièrement sincère avec vous, j’ai surtout appris la patience et même la « zénitude », passant des après-midis au fond des canapés libanais. 


Je crois que je n’ai jamais autant bu de thé et de café. Car non, au Liban on ne refuse pas un bon « Ahwe », une nouvelle occasion de passer des heures à papoter alors que bon, à un moment, il faut s’y mettre… les chantiers n’avancent pas tous seuls. Mais non, c’est que le cinquième thé de la journée, ça passe !


Je ne vous promets pas les paillettes, car oui l’hiver on développe des aptitudes comme celle de pouvoir porter six pulls sur soi ou encore accepter que le poêle du salon enfume bien plus qu’il ne réchauffe… la pièce laissant une odeur marquante sur nos habits !

Je ne vous promets pas les grands chantiers où vos noms seront gravés en mémoire du travail fournit, tels des héros. Mes vendredi après-midi étaient, bien loin de ça, rythmés par la comptabilité, les factures, compte-rendu et tableaux Excel qui volaient dans tous les sens. De quoi s’arracher les cheveux. 


J’ai appris à gérer une équipe ! Au début des inconnus, ils sont devenus des amis.


J’ai appris à faire passer les autres avant moi (bien plus facile à dire qu’à faire).


J’ai appris sur ce que je savais donner mais aussi sur mes limites. C’est une expérience qui ouvre le cœur et l’esprit. J’en ressors grandie et aussi changée. 


Donc si l’aventure vous tente, n’hésitez plus car vous allez vous retrouver à recevoir alors que vous pensiez venir donner.

Un mot : « Merci » 


Merci aux Libanais et à tous les volontaires. Vous avez marqué mon esprit et resterez toujours dans ma mémoire. 


Déjà nostalgique de ce si beau pays.


Ce n’est qu’un au revoir car je reviendrai. 


Allah ma3koun « Que Dieu soit avec vous ».


Jeanne, volontaire au Liban

Votre responsable de pôle

Iseult Béchaux

Responsable des volontaires

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