Elle affirme avoir trouvé le parfait équilibre. La Rostrenoise Morgane Bonaldi, 26 ans, partage aujourd’hui son existence entre la montagne, l’hiver, et le volontariat à l’étranger, l’été. « L’argent que je gagne en hiver, comme serveuse dans les stations de ski, me permet de vivre le reste de l’année ; quand je pars en mission comme volontaire, je suis nourrie et logée », explique-t-elle.
Récemment revenue d’une mission en Irak et en Syrie, Morgane expose, ce mois-ci, à Rostrenen, les photos qu’elle a prises l’été dernier. Un témoignage aussi poignant que captivant de ses semaines passées là-bas. Ceux qui ont pu visiter l’expo, ce week-end, auront pu bénéficier des commentaires avisés de la photographe. Une histoire se cachant derrière chacune des photos exposées, Morgane a en effet pris son temps pour présenter le contexte de chaque prise de vue et raconter les histoires, souvent touchantes, des gens qu’elle a (si bien) photographiés. Lors du vernissage, vendredi soir, elle a même pu échanger avec les réfugiés syriens installés à Rostrenen depuis quelques mois. Ces derniers étaient visiblement très émus de voir des photos récentes d’Alep ou Damas. Des images qui tranchent souvent avec celles qui saturent les écrans de télé du monde entier : « On nous montre toujours les champs de ruine, mais très peu la population, alors que la vie continue malgré tout. J’avais envie de partager ce que j’ai vu ».
Cap sur l’aventure à 18 ans
Cette mission au Moyen-Orient n’était pas le premier séjour à l’étranger de la jeune femme. « Je ne savais pas ce que je voulais faire dans la vie ; je me suis dit que l’inspiration viendrait peut-être en voyageant ». Sitôt le passeport en poche, dès ses 18 ans, la jeune femme part donc à l’aventure… Après un bac S, Morgane se lance dans un DUT information-communication, mais abandonne pour aller vivre un an en Australie. À son retour, elle passe un BTS de commercial international à Lannion. « Je me suis passionnée pour la géopolitique et l’économie internationale durant ces études ; cela m’a donné l’envie de réparer plein de choses qui ne marchent pas dans le monde, en contribuant à des causes qui m’importaient », souligne-t-elle.
Dans le cadre de ses études, elle décroche un stage de six mois en Asie au service d’une ONG, qui l’entraîne au Cambodge et en Malaisie. Une expérience qui la séduit et lui fait envisager une suite. Elle enchaîne d’abord avec un séjour d’un an au Québec, et pousse même jusqu’en Alaska, où elle reste trois mois. Parfaitement bilingue (« le plus beau cadeau que mes parents pouvaient me faire, mon père est Irlandais, ma mère Bretonne »), Morgane dispose, il est vrai, d’un vrai atout pour voyager.
Première mission
Puis c’est l’Afrique, sa première véritable mission comme volontaire, à l’été 2016. « Il s’agissait d’une mission itinérante de trois mois au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie, pour un réseau d’ONG d’Afrique de l’Est. Nous devions faire de la sensibilisation sur l’excision. J’ai trouvé cette expérience tellement enrichissante que je je me suis dit qu’il fallait que je fasse ça tous les ans ! »
L’hiver suivant, tout en travaillant dans les Alpes, elle prépare donc activement son projet suivant. « J’étais très attirée par la Syrie ; j’avais beaucoup de peine en découvrant aux infos tout ce qui s’y passait. Mais je ne me sentais pas de partir en zone de conflit. Cela a été rendu possible à la libération d’Alep, en décembre 2016 ».
« Bien accueillie »
Morgane est alors mise en relation avec un Breton installé à Alep, Pierre Le Corf, qui la guide vers l’association SOS Chrétiens d’Orient. Une fois son visa obtenu – une procédure longue et compliquée – on l’envoie en Irak. Elle passera un mois et demi dans la plaine de Ninive, la vallée des Chrétiens. « Je ne suis pas chrétienne, mais je suis enchantée d’avoir pu vivre cette expérience. J’ai été très bien accueillie », souligne-t-elle. Morgane déblaie les gravats au sein d’anciennes galeries marchandes, ou participe à la relance d’un café ambulant pour les femmes. « La parole est essentielle pour gérer les traumatismes de la guerre. Nous avons vu jusqu’à 80 femmes participer à ces rendez-vous ». Fan de danses bretonnes, Morgane leur a même appris quelques pas de danse fisel.
Début septembre, sa mission se poursuit pour un mois en Syrie : à Damas et Maaloula, tout d’abord, puis surtout à Alep. « J’y ai participé à plusieurs projets de rénovation : il y en avait 18 en cours, raconte-t-elle. On voyait de jour en jour le résultat de ce que nous faisions. J’ai eu un vrai coup de coeur pour la Syrie et je souhaite vraiment y retourner dès que possible ».
Un article de Jean-Noël Potin