Ethiopie : les chrétiens fêtent de nouveau Timkat

Politique Magazine

L’odeur de l’encens a envahi les rues. Un jeune diacre plonge son regard dans l’objectif. Sur un char figurant le Ciel, des enfants vêtus de blanc, des ailes dans le dos, jouent les anges. Après deux ans d’une guerre civile ayant causé environ 500 000 morts et provoqué l’exode de centaines de milliers de personnes, les Éthiopiens orthodoxes ont la joie de célébrer de nouveau Timkat, fête commémorant le baptême du Christ par saint Jean-Baptiste dans le Jourdain, et inscrite par l’Unesco au patrimoine immatériel de l’humanité.

À Gondar, dans le nord du pays, une liesse populaire envahit la ville pour trois jours de cérémonie hauts en couleurs… Trois jours de communion entre plusieurs millions de chrétiens réunis pour partager la même foi. Le 18 janvier, appelé Ketera, est le jour des préparatifs. Ce jour-là, les tabots, des coffres en bois symbolisant l’Arche d’Alliance, sont sortis des églises de Gondar, enveloppés de tissu et de soie. Au cours d’une cérémonie grandiose, le prêtre le plus âgé de chaque paroisse conduit la procession jusqu’aux bains de Fasiladas, portant un tabot sur la tête. La tradition de l’Église orthodoxe éthiopienne rapporte que Menelik Ier, fils du roi Salomon et de la reine de Saba, a enlevé l’arche d’Alliance aux juifs à Jérusalem parce qu’ils avaient perdu la foi et ne suivaient plus les commandements de Dieu.

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Bien qu’elles ne soient que des copies de l’arche d’Alliance originelle (les orthodoxes éthiopiens affirment qu’elle est conservée dans la ville d’Axoum), ces répliques sont tellement saintes que de jeunes gens déroulent un tapis rouge devant les prêtres pour éviter que leurs pieds ne touchent le sol. Durant quatre heures, un cortège ininterrompu de chars remplis de musiciens, prêtres et diacres, revêtus de tuniques blanches cousues de croix dorées, vertes ou bleues, prend possession des rues de Gondar au son des trompettes et tambourins.

Vénération de l’arche d’Alliance

Les élèves de l’école du dimanche ouvrent la marche, martelant des tambours en peau de vache et interprétant des chants spirituels appelés Timkat mezmur. Puis viennent les porteurs d’encensoirs, baignant clergé et fidèles de fragrances capiteuses et, derrière eux, les diacres portant sur leur tête des couronnes et, à la main, des croix de procession aux entrelacs de bois sculpté. Et enfin, ils sont là, les prêtres au visage impassible, portant les tabots, protégés par des ombrelles colorées.

Le soir du 18 janvier, les fidèles passent la nuit à prier et chanter dans l’enceinte des bains de Fasiladas, construits au XVIIe siècle. La messe commence le 19 janvier au petit matin. Les Éthiopiens et les touristes avertis portent des vêtements blancs et se couvrent la tête de foulards. Après la bénédiction de l’eau des bains et au son des trompettes, les séminaristes, puis les fidèles, plongent dans l’eau gelée, renouvelant les vœux de leur baptême. Enfin, le 20 janvier, dernier jour de Timkat, les tabots sont rapportés en procession dans les églises de Gondar. Pour des étrangers, ce déploiement de faste et de festivités peut ressembler à un grand carnaval religieux, mais sur place, à la question « Pourquoi êtes-vous là ? », tous répondent : « Je suis là pour fêter le Christ ». Si possible, dans la paix.

Après deux années de missions ponctuelles, SOS Chrétiens d’Orient vient d’ouvrir un bureau permanent en Éthiopie, où la moitié de la population est chrétienne. Ses équipes de volontaires se relaient sur le terrain pour répondre aux demandes des communautés et des fidèles fragilisés par la guerre civile. Ils ont eux aussi assisté à Timkat, cette fête chrétienne hors du commun.

                                                                             Article écrit par Hugo Morice

Votre responsable de pôle

Pauline Visomblain

responsable relations presse