Le patriarche grec orthodoxe consacre l’église Saints Pierre-et-Paul de Squelbieh

Le vendredi 6 mai 2022, l’équipe de SOS Chrétiens d’Orient en Syrie, accompagnée de Benjamin Blanchard, directeur général de l’association, est à Squelbieh, petite ville de 14 000 habitants située dans la plaine du Gharb, près de Hama, pour participer à  la consécration de la nouvelle église Saints-Pierre-et Paul.

Cette ville historiquement chrétienne compte encore de nombreux fidèles qui, attachés à leur terre, veulent demeurer y vivre. La guerre y a néanmoins fait des ravages. Pendant cinq ans, notamment en 2012-2013, le village, dont un quartier a été complètement détruit, a été bombardé par des milliers d’obus djihadistes, sans être jamais capturé. Les chrétiens se sont organisés en milice d’auto-défense et ont réussi à repousser les assauts des terroristes qui tentaient de les encercler pour finalement effectuer une percée et repousser l’ennemi loin de la ville. Il n’est pas une famille de la ville qui ne soit endeuillée par ces événements tragiques.

La construction de l’église Saints-Pierre-et-Paul a commencé dans les années 1980. Elle était destinée à accueillir les fidèles de la communauté grecque orthodoxe, toujours plus florissante, qui n’avait jusqu’alors qu’une seule église trop petite. Rapidement ralentie par manque de fonds, puis arrêtée par la guerre, la construction a repris lors de la libération de la région et grâce à une nouvelle levée de dons.

SOS Chrétiens d’Orient, qui agit dans la région depuis 2016, a organisé en 2019 un dîner de charité en France en présence de monseigneur Nicolas Baalbacki, archevêque métropolitain de Hama. Grâce à la générosité des donateurs, l’association a participé à cette dernière ligne droite dans la construction de l’église en finançant, pour un total de 50.000 €, le pavement de la cour tout autour de l’église, ainsi que le théâtre extérieur accolé à cette dernière, mais aussi la sonorisation de l’église et, projet majeur, l’iconostase.

L’iconostase, du grec ancien « eikonostasion » qui signifie « images dressées », est un élément central de la liturgie orthodoxe qui délimite la nef et l’autel et symbolise pour les fidèles une fenêtre vers le monde d’En-Haut. Il s’agit d’une haute cloison de bois, d’abord destinée à mettre en valeur le rideau de choeur, lointain descendant du rideau qui fermait le temple de Jérusalem, ornée de nombreuses icônes, parmi lesquelles figurent au centre celle du Christ Pantocrator (en majesté) et de Marie Théotokos (mère de Dieu). Plus qu’une œuvre artistique majeure caractéristique de l’art byzantin, l’iconostase est en réalité le cœur d’une église byzantine, puisqu’elle tourne le regard, le cœur et les âmes des chrétiens vers Dieu par l’intermédiaire des saintes icônes. Il a fallu aux artisans des milliers d’heures de menuiserie, de dessin puis d’écriture des icônes pour réaliser ce chef d’œuvre.

En ce jour de la fête de saint Georges, et après presque quarante ans de travaux, c’est donc avec une immense joie que les habitants de Squelbieh accueillent Sa Béatitude Jean X, patriarche grec orthodoxe d’Antioche et de tout l’Orient, venu consacrer la nouvelle église Saints-Pierre-et-Paul. Chacun a revêtu ses plus beaux vêtements, les jeunes gens du village forment une haie d’honneur ornée de drapeaux blancs, jaunes ou bleus. Les petits enfants vêtus tout en blancs, tels des anges, se tiennent devant le porche de l’église tandis que les scouts, réunis en cortège, fêtent au son des tambours et des trompettes l’arrivée du pasteur qui s’avance sous les pétales de rose que les gamins du village jettent depuis les toits.

La cérémonie commence, inoubliable. Elle durera quatre heures au cours desquelles se dévoileront toutes les étapes de la consécration d’une église puis la célébration de la première messe sur l’autel nouvellement consacré. Premièrement, le cortège fait le tour de l’édifice et s’arrête devant la grande porte qui, après une bénédiction prononcée par le patriarche, s’ouvre sous des cris de joie. La cérémonie, grandiose, suit son cours dans une église bondée jusque sur le parvis.

Le point d’orgue en est la consécration de l’autel et l’insertion des saintes reliques, où le patriarche et tous les évêques et prêtres présents oignent l’autel d’huile sainte, le consacrent, l’encensent, y insèrent les saintes reliques puis le recouvrent des linges liturgiques et des icônes sacrées, et y prononcent les paroles de bénédiction. C’est ensuite au bout d’une perche monumentale qu’un coton baigné d’huile sainte sert à oindre d’un signe de croix les murs et les colonnes de l’église.

Lorsque, après la divine liturgie qui suit la consécration, la cérémonie s’achève, tous se réunissent pour saluer le patriarche. C’est, pour les chrétiens de Squelbieh et des villages alentour, un événement immense : c’est comme si nous accueillions, en France, dans un de nos villages, le pape en personne. Plus encore, c’est un signe de renaissance, un signe de paix, un signe d’espoir pour les chrétiens de Syrie. C’est la preuve qu’une nouvelle fois, la paix a remplacé la guerre, l’amour a vaincu la mort, la Croix a vaincu l’enfer et le Christ est vraiment ressuscité. Les volontaires repartent, témoins de cette espérance qu’ils ont pu lire sur tous les visages et gardant dans le cœur ce cris de joie qui, toute la journée, a résonné dans les murs de la nouvelle église : « Il est vraiment Ressuscité », « Hakan Qan » !