Les volontaires aident Leevi, un agriculteur de Mangesh, dans son verger pendant une journée entière !
« Il est presque dix heures du matin sous un soleil ardent que nous nous rendons à pied au champ de l’un de nos voisins qui nous a demandé de l’aide. A peine arrivés, Leevi débarque avec un grand sourire sur son tracteur rouge, un peu abimé et très bruyant, qu’on peut entendre sur le kilomètre à la ronde.
Nous nous mettons aussitôt au travail, notre mission aujourd’hui : installer un système d’irrigation pour la centaine de pommiers qui lui appartiennent. Tuyaux et robinets en main, il nous explique comment bien les mettre en place.
Au pied de chaque pommier, nous devons déployer le tuyau percé d’un robinet d’où s’écoulera l’eau quand arrivera la période des fortes chaleurs.
Cette besogne peut, au départ, sembler assez complexe : il faut avoir suffisamment de force pour bien emboîter les robinets et les tuyaux ensemble, et nous devons également mesurer la distance entre deux pommiers pour savoir comment les placer. Leevi nous montre l’exemple, une fois toutes les instructions données, c’est à notre tour ! Nous nous répartissons entre les rangées de pommiers afin que la tâche avance efficacement.
Deux heures plus tard, à la demande de Leevi, une pause s’impose ! Nous nous asseyons sous l’ombre des arbres, et il nous apporte des victuailles avec de quoi apaiser notre faim et soif : De l’eau, du café, et des petits gâteaux.
Ce petit moment nous permet de faire plus ample connaissance. Nous découvrons alors un homme bienveillant et attentionné. Il nous raconte son histoire. Il est le dernier fermier chrétien de Mangesh.
Au bout d’un certain temps, Leevi se lève, et nous demande de l’attendre. Quinze minutes plus tard, il revient avec une casserole qui semble bien garnie à la main. Il avait prévu de nous offrir le déjeuner. Nous sommes tous très touchés par cette générosité particulière.
Nous dégustons donc du bryani : un plat traditionnel irakien, constitué de riz, de poulet, un peu de raisin et des cacahuètes. Un vrai délice !
Puis nous insistons pour l’aider à ranger l’entrepôt ; nous découvrons alors des bidons vides, des outils et mêmes des masques anti-gaz, Leevi nous explique que ceux-ci appartiennent à son père et datent de l’époque Saddam, lors du massacre des kurdes baptisé « l’Anfal ».
Ces découvertes nous permettent d’en apprendre encore plus sur notre nouvel ami !
Après deux bonnes heures de rangements, nettoyage et jardinage, nous remercions Leevi et rentrons à la maison, bien décidé à faire perdurer notre collaboration avec ce fermier pas comme les autres. »
Si l’on ose s’éloigner des quartiers touristiques de Louxor, loin du souk flamboyant, de l’antique temple et de son McDonald’s, du Nil couvert de felouk, si on s’enfonce loin de la splendeur de la ville, l’on tombe sur le pauvre quartier de Sawaky.
Les murs sont en brique nues défrichées de crépie. Les rues sont étroites et calmes. Ici, rien de vraiment spécial, pas de beauté particulière, pas de grandeur cachée sous les siècles. Rien que la terriblement banale réalité de la pauvreté, du chômage, du manque de formation, du manque d’accompagnement, du manque de médecins, du manque de médicaments.
L’Église se débat pour aider les chrétiens villageois tant qu’elle peut. SOS Chrétiens d’Orient assiste le Père Paulo, prêtre copte catholique de la paroisse de la Sainte-Famille et Saint-Joseph, en finançant notamment la rénovation d’un nouveau bâtiment de cinq étages qui accueillera les services sociaux de l’Eglise, les cours de catéchisme, les activités des scouts et surtout deux étages de dispensaire.
Aujourd’hui, les volontaires y sont spécialement missionnés pour participer concrètement aux travaux.
« Nous arrivons tôt sur le chantier, les ouvriers sont déjà au travail. Nous les hélons depuis la rue pour qu’ils nous jettent les clés de l’entrée, dissimulée derrière une bergerie urbaine. Mais l’accès n’est pas simple : un bélier garde farouchement les lieux et charge tout ce qui s’approche. L’un de nous le maîtrise par les cornes, une autre retient les chèvres prêtes à s’enfuir, tandis qu’un troisième s’acharne sur le cadenas. L’accès enfin libéré, nous grimpons les deux étages déjà construits.
Au rez-de-chaussée, les briques sont triées selon leur taille et leur forme. Celles jugées utilisables sont empilées dans une brouette, puis hissées jusqu’au troisième étage à l’aide d’un treuil, vidées sur place, avant de redescendre par le même chemin. Pendant ce temps, le mortier est préparé à même le sol, formant un petit cratère dans le sable. Tout au bout de cette chaîne, un ouvrier expérimenté bâtit le mur, en équilibre précaire sur des briques inutilisables, guidé par un fil à plomb pour garantir la régularité de l’ouvrage.
Chaque ouvrier a un rôle bien défini dans cette chorégraphie de précision. Et si chacun maîtrise son poste à la perfection, quelques mains volontaires sont toujours les bienvenues. Il faut un petit temps d’adaptation pour comprendre sa place dans cette mécanique bien huilée, mais une fois le rythme trouvé, tout s’enchaîne sans relâche : le sable est tamisé et tassé, les briques sont triées, les brouettes montent et descendent sans fin.
Le temps passe sans que nous nous en rendions compte. Ce n’est que lorsque l’hospitalité copte, intransigeante, nous impose une pause autour d’un brasier improvisé pour boire le thé avec les ouvriers, que nous réalisons tout ce qui a été accompli : en trois heures, deux tas de briques ont été triés et un mur et demi érigé.
Nous savourons ce thé avec la satisfaction du travail accompli, entourés de nos hôtes devenus compagnons de chantier. Et déjà, une certitude s’impose : nous reviendrons, impatients de poursuivre notre effort pour l’ouverture de ce centre, qui changera la vie de tant de familles.